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Biais rétrospectif : les dangers du « je le savais ».

Xavier Debril
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© Pixabay

Visitant une usine de masques près d’Angers, le 31 mars dernier, Emmanuel Macron appelait « à la dignité et à l’esprit de responsabilité celles et ceux qui construisent des connaissances d’aujourd’hui quand ça n’était pas celle d’hier » (La Tribune). S’il ne nous appartient pas de commenter sur le fond cette phrase du président de la République, celle-ci illustre parfaitement la notion de biais rétrospectif ou le piège du « je le savais ». Un danger qui menace dans l’analyse de l’échec d’une négociation ou si un événement inattendu la perturbe.

Qu’est-ce qu’un biais rétrospectif ? Incontestablement, c’est l’un des biais cognitifs les plus pervers tant il fausse l’appréhension de la réalité. Il consiste en une erreur de jugement désignant la tendance qu’ont les personnes à surestimer rétrospectivement le fait que les événements auraient pu être anticipés moyennant plus de prévoyance ou de clairvoyance. Comme l’explique Olivier Sibony dans sa lettre d’informations Philonomist.com : « Une fois un événement advenu, nous oublions à quel point il était imprévisible. Dans le rétroviseur, la visibilité est parfaite ».

Décrit en 1975 par le professeur en sciences sociales Baruch Fischhoff et observé à travers une série d’expériences, le biais rétrospectif se traduit de trois manières (source : la toupie.org) :

  • La tendance à surestimer la probabilité d’un événement lorsque l’on sait qu’il s’est déroulé.
  • L’estimation de toutes les alternatives de même valeur tout aussi probables lorsque l’on ne connait pas l’issue de l’événement.
  • L’estimation plus probable de l’une de ces alternatives si on fait croire que celle-ci est survenue même quand elle ne l’est pas.

Comment expliquer cette tendance ? « Par le fait, commente latoupie.org, qu’un événement qui s’est produit est plus accessible mentalement que des situations possibles qui ne se sont pas produites ». Dangers : des erreurs de raisonnement dans le comportement individuel, le diagnostic, la gestion des risques et bien sûr une mauvaise interprétation du contexte avant les événements.

La parade : l’analyse détaillée de tous les scenarii possibles depuis des données concrètes et avérées avant que l’événement ou l’inattendu ne se produise.

« Je savais que ça se passerait comme ça ! » Une manière de justifier un échec qui n’est finalement fondée sur rien, puisque c’est l’inattendu qui en a décidé. Dans le cadre d’une négociation ratée de ce fait, le « je le savais », sera une piètre consolation. Il faut savoir sans cesse remettre les pendules à l’heure grâce à du plausible. Le biais rétrospectif peut en effet altérer notre jugement, notre mémoire et notre lecture du passé… « Si vous pensiez que vous saviez quelque chose, vous ne chercherez pas à comprendre ce qui s’est réellement passé », analyse Neal Rose, expert en psychologie.

On ne réécrit pas une histoire, la sienne ou la grande, en la regardant dans son rétroviseur !

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